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Immaturité scientifique de l'institution psychiatrique.

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Jacques:
Un trou dans la nosographie psychiatrique. Hé oui ! Encore un trou, dû au biais d'adressage ! Ce sont les hurlements de triomphe hors de tout propos, d'un charlatan professionnel - on les consultera au Staunisier : http://deonto-ethics.org/impostures/index.php/board,16.0.html - qui nous ont mis en face de l'évidence.

Prisonniers de leur biais d'adressage, les psychiatres de cabinets n'ont jamais pensé à en dresser la catégorie psychiatrique : jamais les charlatans ne consultent spontanément. Si d'aventure on les capture, c'est presque toujours dans un cadre judiciaire correctionnel, et non criminel, et il n'y a pas d'expertise psychiatrique demandée.

Exception : Jean-Claude Romand, parce qu'il a conclu sa mythomanie par cinq meurtres, ou six meurtres si l'on inclut le meurtre de son beau-père (la justice a renoncé, mais ça ne trompe personne).
Prisonnier de son bluff, le charlatan n'a aucune profondeur stratégique : il ne peut plus jamais reculer, il doit se cramponner à sa façade. Toute son emprise repose sur sa façade, et il ne peut vivre s'il n'a emprise sur des crédules.
J'ai eu le sombre privilège, au cours de ma carrière, de fréquenter d'assez près toute une brochette d'escrocs et de charlatans, détails à
http://jacques.lavau.perso.sfr.fr/Stargil_en_galerie_d_escrocs.pdf
Un témoin, du ministère de l'Industrie, raconte : "J'ai vu au fil des mois l'évolution pathologique de Michel L. A chaque réunion, la discussion technique s'arrêtait toujours plus tôt, les apéritifs arrivaient toujours plus vite, la cour empressée remplissait le verre de Michel L. à mesure qu'il le vidait..."
Jusqu'à ce que Michel L. s'enfuie en hélicoptère, laissant derrière lui un trou d'environ cinquante millions de francs. Un flou demeure sur le montant réel du détournement, car pour sauvegarder leur réputation de banquiers infaillibles, les principaux intéressés ont étouffé l'affaire, qui n'est jamais allée en justice.

Il est futile de se demander si le charlatan croit à ses mensonges, ou s'il est prisonnier d'une illusion initiale, ou s'il se contente de mentir cyniquement aux gogos, parce que cela lui rapporte du pognon et du pouvoir. Les deux mobiles s'entrelacent toujours plus intimement au cours de la carrière du charlatan. De toutes façons, il suffit de regarder les choses du point du vue de l'épidémiologiste, préoccupé de contage en maladie mentale, pour voir l'académisme futile de la question : de toutes façons, le charlatan est d'autant plus dangereux et nocif qu'il a de pouvoir et d'audience, ou qu'il agit en réseau de charlatans, qui se donnent l'un à l'autre une aura d'audience et de respectabilité.

Le charlatan s'écarte de la définition standard du psychotique, en ce sens qu'il garde une prise sur la réalité, une seule du reste : il sait comment manipuler les gens pour ne pas se faire pincer, pour continuer d'entretenir l'illusion et l'emprise, au moins chez les plus naïfs, les plus convaincus d'avance. De ce point de vue, feu ma mère était maladroite dans le charlatanisme, car ses manipulations étaient cousues d'assez de fils blancs, pour bientôt attirer les quolibets et le mépris.

Le charlatan se rend au fil du temps de plus en plus psychotique, en ce sens que le déni de réalité envahit peu à peu toute sa vie.

Les traits communs :
1. Ce sont tous des publicitaires. Ils ont le génie du mensonge et de l'illusion. S'ils n'ont pas le génie, du moins, c'est leur talent principal : hypnotiser leurs gogos.
2. Ils ont repéré une source de financement, dépourvue d'épreuve de réalité. Un astrologue exploite la crédulité et l'inculture du grand public. Un Jean Staune exploite la dinguerie fanatique de la John Templeton Foundation.
3. Ils sont tous despotiques et pervers, mais savent dissimuler leur mépris total envers leurs contemporains.
4. Ils ont repéré un domaine aveugle dans la culture environnante, où leur bluff peut passer pour du génie, car personne ou presque ne dispose de la culture générale et scientifique nécessaire pour les démasquer rapidement. Du moins personne, là où ils frappent.

Voici en revanche les zones d'ombre, où notre ignorance demande plus d'études :
- Epidémiologie amont : nous ne savons pas leur genèse. Nous ne savons pas les lois générales de ce qui produit de tels charlatans.
- Nous ne savons pas les traiter. Il n'y a pas d'études autres que rares et ponctuelles, sur la réhabilitation éventuelle des escrocs et charlatans (tout ce dont j'ai connaissance, est une étude du comportement de Jean-Claude Romand en prison, où il joue le prisonnier modèle). Il serait intéressant par exemple, d'avoir une description fiable et détaillée de la seconde carrière de Michel L. après sa fuite en Australie.

La seule constante dans leur genèse, que je constate sur les charlatans que je connais personnellement, notamment dans ma famille, est que ce sont des narcissiques vaniteux, qui prétendent très au dessus de leur compétence réelle.

Que la corruption ait joué un rôle important dans leur vie, ne semble pas être une constante, bien que ce soit fréquent.

Jacques:
Liens :
http://www.lemonde.fr/societe/article/2012/11/14/a-marseille-une-psychiatre-sur-le-banc-des-prevenus_1790218_3224.html
http://www.lemonde.fr/societe/article/2012/12/18/la-psychiatre-d-un-patient-meurtrier-condamnee-a-un-an-de-prison-avec-sursis_1807975_3224.html

La profession des psychiatres dans la salle faisait tout le raffut qu'elle pouvait, pour protester contre la mise en examen de Danièle Canarelli.
Ils ont raison sur un point : le préfet et la préfecture aussi sont coupables.

La psychiatre est demeurée prisonnière de ses émotions, de ses mobiles transféro-transférentiels : on néglige de se faire superviser, quand on sort de fac de médecine.

--- Citation ---Le docteur Canarelli se refuse pourtant à poser ce diagnostic. Elle lève régulièrement les mesures d'hospitalisation d'office et lui accorde des permissions de sortie. Au président qui lui demande pourquoi elle n'a pas suivi les recommandations de ses confrères sur la nécessité de soumettre Joël Gaillard à un cadre psychiatrique plus contraignant, elle répond: "On ne peut pas toujours être dans la coercition." "Mais comment soigner un patient qui n'est pas consentant autrement que par la coercition?", intervient le président. "J'étais dans une relation de confiance avec lui. Il venait à tous les rendez-vous, ce qui est rare, et il n'y avait aucun incident de comportement pendant les hospitalisations. Le consentement du patient est essentiel si l'on veut engager une relation thérapeutique dans la durée."

Fabrice Castoldi plonge dans le dossier, en extrait un bout du rapport du docteur Archambault: "Au fil des années, le docteur Canarelli n'a pas tenu compte des avis des différents psychiatres et experts qui avaient formulé un diagnostic particulièrement clair. Il y a eu en quelque sorte un enfermement dans le déni, le déni de Joël Gaillard ayant entraîné un déni de l'équipe soignante." Elle répond: "C'était un patient plus compliqué que les autres. J'étais confrontée à une énigme. J'étais convaincue qu'il présentait une pathologie psychotique mais j'étais embarrassée par l'absence de symptômes."

Le président lui demande alors, abruptement: "Mais pourquoi n'avez-vous pas passé la main?

- Ce n'est pas si facile que ça de passer un patient à une autre équipe."

Pour Danièle Canarelli, la principale difficulté est à venir. En février2004, de nouveaux clignotants s'allument. La soeur de Joël Gaillard prévient le médecin que son frère est très agressif et qu'il profère des menaces de mort. Au même moment, le patient ne se présente pas à un rendez-vous avec sa psychiatre car il s'est blessé à la main et doit subir une opération. Les conditions de la blessure  - une coupure grave, à la suite d'une altercation à l'arme blanche - inquiètent le docteur Canarelli qui demande son transfert dans son service psychiatrique après l'opération. Lorsqu'il se présente quelques jours plus tard devant elle, elle lui annonce qu'elle va le réhospitaliser. L'entretien tourne court, Joël Gaillard se lève brutalement et quitte le pavillon où la médecin, qui est seule avec un infirmier, ne peut pas le retenir. "Nous n'avons pas tenté. Il était mal et aurait pu nous faire mal. Nous n'avons pas eu le temps de prévenir les renforts.

- Mais vous n'aviez pas imaginé l'hypothèse d'une fugue?

- Non, il était calme."

Elle attend trois heures pour signaler sa fuite à la police. "Mais ça veut dire qu'un patient part dans la cité alors que vous nous dites qu'il était mal et qu'il pouvait faire mal...", observe le président.

On sent que ses questions font monter l'indignation dans le public de professionnels massé au fond de la salle d'audience. "Il faudrait que les juges viennent faire un stage dans les hôpitaux psychiatriques", murmure une femme à sa voisine. Trois semaines plus tard, Joël Gaillard se présente devant le domicile de sa grand-mère et frappe à mort la tête de son compagnon, Germain Trabuc.

"Cette affaire, c'est la chronique d'une mort annoncée, relève Me Gérard Chemla, avocat du fils de la victime. On ne peut pas se laisser enfermer dans un raisonnement absurde selon lequel la justice n'a aucune compétence pour juger les malades mentaux et qu'il faut les remettre à l'institution psychiatrique. Une poursuite comme celle-ci est saine. Il y a un moment où la défense sociale doit passer avant le patient", conclut-il.
--- Fin de citation ---

François Lelord a avoué avoir aussi laissé échapper un cyclothymique en pleine crise d'exaltation, parfaitement dangereux pour lui même et les autres, notamment son épouse.
Ça s'est bien terminé parce qu'il a été arrêté en excès de vitesse, s'est battu avec les flics, qui l'ont alors arrêté et interné. Sans cela...

Un commentaire de lectrice :

--- Citation de: Pascale Walter ---Par ailleurs, créer une relation avec un malade ne donne pas forcément à cette relation un caractère thérapeutique, même si on est médecin.
--- Fin de citation ---

De fait, devenir thérapeute, ça s'apprend, et pas forcément en fac de médecine.  Ne serait-ce qu'en raison d'une des règles de base de la psychothérapie : on se fait superviser. Or justement, prisonniers de leurs privilèges légaux et de leur complexe de supériorité, ceux qui sortent de médecine détestent se faire superviser. Leur transféro-transférentiel en reste volontiers au n'importe quoi. Il semble bien que la Danièle Canarelli était bien dans ce cas.

Le juge pour enfants Jean-Pierre Rosenzweig a raconté un cas similaire, où s'il se laissait gouverner par l'émotion, il restituait leurs enfants placés, à un couple qui lui semblait parfait. Il a la conscience d'ouvrir le dossier, et houla, houla, houla... Nombreuses violences envers ces enfants, des gens à double face.

Des psychothérapeutes romains ont eu aussi affaire à un piège à cons : un enfant schizophrène à double face, ange devant eux, démon en famille. Seul un des témoignages qu'ils auraient risqué de négliger, leur a donné la clé de l'énigme. Source ? Andolfi, Angelo, Nichilo Andolfi ? ESF.

S'occuper de psychotiques, ça n'est pas pour blancs-becs, esclaves de leurs émotions.


Un classique à consulter :
Jacques-Antoine Malarewicz. Supervision en thérapie Systémique. ESF.

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